Portrait Marine Colle Bordry, participante AVARAP

On peut dans le même temps être passionnée de Shakespeare et de jeux vidéo, de littérature de la Renaissance et de science-fiction, passer un bac scientifique et poursuivre des études littéraires, et profiter de son passage par un groupe AVARAP pour changer complètement d’orientation. Toutes ces contradictions – uniquement apparentes – sont présentes dans une même personne, Marine Colle-Bordry.

 

« Avec le recul, je trouve que mon parcours est fait de ruptures successives », sourit Marine, qui évoque en vrac son bac scientifique, ses études littéraires en khâgne à Victor Duruy, son DEA de littérature comparée des Renaissances française et anglaise à la Sorbonne puis en Angleterre, ses études d’informatique ou son travail dans le marketing digital.

Née à Paris il y a trente-neuf ans, elle s’évade très rapidement vers deux domaines propres à développer l’imaginaire : la littérature de fantasy et de science-fiction et les jeux vidéo. « On peut dire que je suis rapidement devenue une geek, admet-elle. Je suis tombée dans les jeux vidéo dès l’âge de 10 ans. J’y ai cultivé une grande capacité d’imagination. »

 

Graphistes, ingénieurs, professeurs en reconversion…

Elle suit un cursus classique de bonne élève et obtient un bac scientifique avant… de s’inscrire en littéraire à Victor Duruy en hypokhâgne. Elle poursuit son parcours à la Sorbonne et décide d’aller passer un an en Angleterre en bénéficiant des possibilités offertes par Erasmus.

« J’y passe une année très riche, se réjouit-elle. De l’autre côté de la Manche, les études ne sont pas conçues en silo. Je peux suivre des enseignements littéraires et scientifiques, faire du théâtre, étudier le cinéma italien et la poétique de la ville, tout en suivant des cours d’informatique. » De retour en France dans les années 2000, alors que le Web explose, elle convainc un jury réticent qu’elle peut suivre, dans le cadre d’une école d’ingénieur – Sup Telecom –, un mastère spécialisé sur le multimédia. « Les participants étaient à l’image des cours : très variés, se souvient-elle. Parmi mes coreligionnaires, se trouvaient des graphistes, des ingénieurs et des professeurs en reconversion. Les matières enseignées se situaient dans les sphères créative et technique, sans oublier le droit du multimédia. J’ai adoré. »

 

Dans la Silicon Valley parisienne

Son mastère en poche, elle rejoint une agence Web de la Silicon Valley française dans le Sentier parisien, puis une grande agence digitale indépendante, Duke. Elle y reste six ans et elle pénètre des univers variés de l’automobile au luxe en passant par le food et le sport. Et elle y développe un large savoir-faire en gestion de projets, en management d’équipes pluridisciplinaires, et en stratégie et marketing digital. Le tout dans un secteur émergent et en plein essor. Rachetée par Microsoft puis par Publicis, son agence Web perd une partie de son âme et la voilà recrutée par Europacorp, le studio de Luc Besson. Elle intègre la Cité du cinéma pour y diriger le département de marketing digital.

« Le milieu du cinéma est très particulier, confie-t-elle. En tant que directrice du marketing digital, je me retrouve en frontal avec des gens qui considèrent Internet, vecteur de piratage, comme l’ennemi, aussi bien que comme un terrain d’opportunités. Mes missions sont très larges : faire la promotion des films sur le Web, monétiser les contenus, mettre en place des partenariats media,  lancer l’e-commerce de l’activité d’exploitation de salles, le tout dans une ambiance de travail parfois compliquée. J’ai peiné à trouver ma place. » Avec le soutien de ses équipes –  « elles étaient « en or » – elle passe quatre ans dans cette industrie très fragile dont le credo est de créer des produits non pas en fonction des attentes du consommateur mais en espérant qu’ils rencontrent l’adhésion du public.

« J’ai tenu le choc tant que j’ai pu, poursuit-elle. La rupture conventionnelle qui m’a été proposée  en 2014 est arrivée à point nommé. Je me sentais épuisée, j’étais sur le coup du décès de mon père, j’étais vidée. Heureusement, j’ai décidé de me faire suivre par un coach – ”quel beau métier” –  pour y voir plus clair dans mon avenir professionnel. » Elle est sûre de ne plus avoir envie de sa « vie d’avant » et elle recherche une activité qui « ait davantage de sens ».

 

Cooptée comme animatrice

Un ami lui parle alors de l’Avarap. Elle est séduite par cette idée de travail en commun et d’intelligence collective. Après plus de deux ans de solitude, elle aspire à entrer dans un groupe et à définir un projet professionnel qui lui ressemble. Sa participation à la RIM la conforte dans son choix et elle s’inscrit. Elle trouve dans le groupe des Dreamcatchers tout ce à quoi elle aspirait  et elle est cooptée comme animatrice. « J’étais en même temps ravie et… effrayée par la tâche. Heureusement, les deux journées de formation m’ont rassurée et ont dédramatisé la fonction. J’y ai pris beaucoup de plaisir. »

Le projet professionnel de Marine est aujourd’hui bien avancé : elle vient de démarrer une formation de coaching qui se terminera fin juin. Elle a intégré une association –  Wintegreat –  qui aide les jeunes réfugiés à se définir un futur professionnel. Elle y met à profit tout ce qu’elle a appris dans la conduite de son groupe Avarap.

« Je réfléchis à une offre de coaching par le jeu, du jeu théâtral au jeux de plateau, de rôles, ou vidéo… », conclut-elle. Une façon de se différencier tout en rebouclant avec les passions qu’elle cultive depuis ses 10 ans.