Moi entrepreneur : suis-je fait pour créer ou reprendre une entreprise ?
Après une expérience réussie de salariat, la création ou la reprise d’une entreprise tentent quantité de cadres expérimentés de bon niveau. Et la crise sanitaire a sans doute accéléré cette tendance. Si ce choix doit être mûrement réfléchi, il ne faut pas s’arrêter aux aspects financiers et opérationnels de l’affaire et se poser des questions d’ordre plus personnel voire psychologiques. Revue de détail.
Les cadres sont de plus en plus nombreux à se reconvertir en créant leur entreprise. Ainsi près de trois cadres sur dix rêvent de développer un projet. Les raisons en sont multiples : aspiration à plus d’indépendance, envie de développer une idée, de relever un nouveau challenge. Ainsi par exemple, après de longues années passées au service d’un grand groupe, il peut être tentant d’envisager de se lancer à son propre compte. Cependant, le professionnalisme, la motivation et l’expérience ne font pas tout.
Un nouveau départ sur un chemin mal connu
La création d’entreprise est une nouvelle aventure qu’il faut vivre en faisant abstraction de la vie précédente. L’entreprenariat est un tout autre métier, quel que soit le métier et le milieu précédents. Un cadre de haut niveau possède généralement la plupart des atouts permettant de structurer et de bien organiser une entreprise. Mais il est essentiel de réaliser que gérer un service spécialisé dans une grande entreprise ne fait pas appel aux mêmes compétences qu’accompagner une équipe dans la construction et le développement d’une nouvelle PME. Il faut garder en tête que dans cette aventure on recommence tout de zéro ou presque. S’il est normal d’être impatient que son entreprise prenne rapidement son essor, il faut avoir conscience que le succès entrepreneurial ne vient pas du jour au lendemain.
Un statut très différent
Dès que l’on a une idée précise de sa future entreprise, il est nécessaire de se pencher sur sa situation personnelle afin de déterminer si elle est compatible avec son projet. Pour cela, le futur entrepreneur doit s’interroger sur sa situation professionnelle actuelle, faire un bilan de ses réussites et échecs passés et en mettre bien en lumière les raisons. Il doit aussi faire un point précis sur sa situation familiale et patrimoniale ou encore sur ses compétences et sa personnalité. Le questionnement fait partie des maîtres-mots du créateur. Avant de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale, il est en effet indispensable d’en bien mesurer toutes les conséquences.
Le sentiment de grande liberté peut parfois cacher la réalité du quotidien de l’entrepreneur. La création d’une entreprise repose essentiellement sur son auteur. Il est très important qu’il soit en phase avec toutes les facettes de sa future entreprise et qu’il soit bien conscient des contraintes et difficultés que cela représente.
L’équipe à constituer et son bon management sont la clé de voûte du projet et comptent sur près de la moitié dans ses chances de réussite. Les partenaires financiers vont se pencher très sérieusement sur les aspects financiers et opérationnels de l’entreprise, mais surtout ils vont s’attacher à comprendre la personnalité et les motivations du porteur du projet, sa stratégie, la qualité de ses associés et de ses partenaires. Est-il capable de faire face à tous les aspects de cette création et d’en assurer la bonne exécution ? La qualité d’exécution représente en effet plus de 30 % de la réussite. Une fois l’idée trouvée et retenue, l’équipe constituée et la stratégie de départ définie, il faut entrer dans le vif du sujet, à savoir le business-model. Cette étape, autrement dit la description générale du projet, va venir expliquer de quelle manière l’activité va générer de la valeur pour le client et pour l’entreprise en retour. Ce business-model permet de mettre en lumière les liens entre la proposition de valeur du créateur, ses clients, ses partenaires et ses revenus, ainsi que le type d’organisation de l’entreprise. C’est par ce moyen que se précise la cible visée, le type de communication à adopter, mais surtout la rentabilité financière et même la notoriété escomptée. Bien entendu il sera nécessaire de s’attacher les services d’un expert-comptable. Toutefois les techniques comptables, commerciales, organisationnelles, même si elles sont indispensables ne peuvent suffire à assurer le succès complet du projet.
Les quatre dimensions-clés du projet
La personnalité, le dynamisme, l’équilibre, les capacités d’anticipation et de clairvoyance du porteur de projet sont essentielles et souvent déterminantes dans la réussite de l’ensemble. En voici quatre aspects :
– L’auto-efficacité. Elle doit être comprise comme la confiance du créateur en sa capacité d’organiser et d’exécuter la ligne de conduite requise pour produire les résultats souhaités. C’est donc le jugement et le regard de l’intéressé sur ses propres capacités, et ses aptitudes à faire valablement face à des situation difficiles, et à pouvoir les surmonter avec succès afin d’atteindre ses objectifs. Les individus ayant un bon sentiment d’auto-efficacité ont tendance à se fixer des objectifs stimulants. Ils persistent en vue de la réalisation de leur but, même dans des conditions difficiles et stressantes.
– L’optimisme. C’est une disposition cognitive qui consiste en une forte confiance en soi, mais une confiance réaliste et flexible. Une personne ayant un optimisme réaliste et équilibré est plus armée et motivée pour atteindre les objectifs quelle s’est assignés. Les personnes optimistes sont plus adaptables aux différents changements qui surviennent de manière parfois brutale dans la vie de leur entreprise. Cette qualité leur permet également de mieux identifier des opportunités, ou encore de rebondir plus vite après un passage difficile.
– L’espoir. L’espoir fait référence à un état émotionnel positif fondé sur une interaction entre trois composantes : l’objectif, l’énergie orientée vers un objectif et la planification des moyens. Il est un état cognitif ou de pensée par lequel un individu est capable de se fixer des objectifs et des attentes réalistes mais aussi ambitieuses, et de chercher à les atteindre. Des recherches ont montré une relation positive entre l’espoir et la satisfaction des entrepreneurs à être propriétaire d’une entreprise. Il est à l’origine de la créativité, de l’innovation et de la bonne mobilisation des ressources d’une manière générale.
– La résilience. Elle renvoie à la manière dont les individus parviennent à tolérer les épreuves, à rebondir pour obtenir le succès, ou à revenir au fonctionnement normal de la vie quotidienne après avoir fait face à des difficultés importantes ou à des échecs. Ainsi la résilience comprend les habiletés et les forces psychologiques de la vie quotidienne qui peuvent être identifiées, mesurées, entretenues et améliorées à tout âge et dans toutes les dispositions psychologiques d’un individu. La résilience peut être développée à divers degrés. Cependant, les personnes faiblement résilientes, et qui le savent, sont plus vulnérables, et souvent incapables de revenir à un régime normal sur les plans de l’activité et de la psychologie.
Emile Biardeau
Avarap