Lors d’une recherche d’emploi, les cadres doivent composer simultanément avec une pression personnelle, financière et sociale, tout en conservant une posture professionnelle convaincante. Les enjeux identitaires, l’incertitude, et la durée parfois longue des démarches peuvent générer un stress important, voire une anxiété durable et profonde. Comprendre ces mécanismes et mettre en place des stratégies adaptées est essentiel pour maintenir un bon niveau de motivation, préserver l’équilibre psychologique et maximiser ses chances de réussite.

 

Pour la grande majorité des cadres, le travail est un élément central d’identité : il structure son existence, lui confère un statut social et nourrit son sentiment de sens et d’utilité. La perte d’emploi, et même la transition de carrière choisie, entraînent donc une profonde remise en question. La peur de ne pas retrouver un poste équivalent peut s’accompagner d’un sentiment de perte de valeurs et de compétences. Cette pression est accentuée par les attentes de l’environnement familial et social.

 

Incertitude et perte de contrôle, compétition et peur de l’obsolescence

Les cadres sont habitués à maîtriser leur environnement, à décider, à planifier et piloter. Lorsqu’ils se retrouvent demandeurs d’emploi, ils passent de l’action à l’attente, où les réponses des recruteurs échappent à leur contrôle. Cette perte de prévisibilité et de contrôle est un déclencheur majeur d’anxiété.

Même dotés d’un certain niveau de ressources et d’épargne, les cadres ont souvent des charges financières importantes (crédits, train de vie à préserver si possible, etc.) et se sentent responsables de la sécurité du foyer. Les proches, même bien intentionnés, peuvent accentuer la pression en posant des questions récurrentes sur le résultat des entretiens et les perspectives. Cela renforce leur sensation de retard, de décalage, et provoque même parfois de la culpabilité.

Le marché du travail des cadres est particulièrement compétitif et souvent mouvant. Et certains secteurs évoluent très vite. Cela explique la crainte de n’être plus à jour après six mois ou un an de recherche d’un nouvel emploi (en technologie, en management, en langues en particulier) et nourrit une anxiété supplémentaire. L’impression que « les autres sont meilleurs » peut s’imposer rapidement. Et cela peut devenir une réalité si la période de recherche d’emploi s’éternise.

 

L’impact du stress sur la recherche d’emploi

Le stress prolongé se manifeste souvent par des tensions musculaires, des maux de tête, de la fatigue chronique, des troubles du sommeil, de l’irritabilité et des pertes de motivation. Cela entraîne des difficultés de concentration voire une rumination mentale… Un cercle vicieux peut se mettre en place : plus la recherche d’emploi avance difficilement, plus le stress augmente… Ce qui rend la recherche encore moins efficace et peut conduire à des échecs répétés.

Un cadre stressé aura tendance à procrastiner et à manquer d’assurance lors des entretiens. En particulier, il sera tenté d’accepter trop vite des postes sous qualifiés (et aussi sous rémunérés), par peur de ne rien trouver. Au contraire, il pourra se bloquer face à de bonnes opportunités par manque de confiance en soi. La gestion du stress est donc un élément clé de performance dans la transition professionnelle.

 

Des stratégies pour gérer le stress et l’anxiété

Le cadre peut retrouver son identité de manager en structurant sa démarche. L’objectif est de transformer une période subie en une période pilotée. Il convient ainsi d’établir un planning hebdomadaire, et de bloquer des plages dédiées principalement à la veille sur le marché du travail et la gestion des candidatures, le travail sur les outils (CV, LinkedIn, etc.), le développement du réseau, la formation et les activités personnelles. Ainsi un planning précis (de six à huit heures par jour, afin d’éviter trop de fatigue) réduit la sensation de dérive et redonne du contrôle. Il est aussi important de se fixer des objectifs réalistes : par exemple, 5 à 10 candidatures bien ciblées par semaine, 2 à 4 rendez-vous réseau par semaine, éventuellement l’apprentissage d’une nouvelle compétence par mois. Ces objectifs mesurables et adaptés renforcent la motivation.

Ainsi, il est bénéfique de faire le point sur ses réussites. Une technique efficace consiste à rédiger un « bilan de compétence express » qui permet de mettre en valeur les moments forts de la carrière, les compétences clés, les retours positifs des équipes ou des clients, etc. Cela réactive la fierté professionnelle et aide à parler de soi avec plus d’assurance, en particulier lors des entretiens. Il est aussi bon de cesser de se comparer négativement aux autres, de reconnaître que la transition professionnelle est un passage normal et courant dans une carrière moderne. Tout ceci constitue des attitudes protectrices contre l’anxiété.

 

Activer et développer son réseau

Le réseau est une source de soutien psychologique et aussi d’enrichissement professionnel. Il permet d’éviter l’isolement, par exemple en participant à des événements professionnels par le biais d’associations d’anciens élèves, de clubs de managers, de rencontres avec des entrepreneurs. Le but n’est pas de multiplier les contacts mais de créer des relations authentiques basées sur l’échange et l’entraide. L’échange avec des pairs permet de relativiser, de se sentir compris et d’obtenir de précieux conseils concrets ou, encore mieux, de créer une relation prometteuse avec un décideur.

Il est nécessaire d’avoir une activité physique régulière, et cela est d’autant plus facile que l’on dispose de plus de temps. La pratique sportive réduit le cortisol (l’hormone du stress).

Trente minutes d’activité physique par jour ont un effet immédiat sur l’anxiété. La gestion émotionnelle peut passer par la méditation, la respiration, la cohérence cardiaque. Ces techniques simples stabilisent le système nerveux. Il convient également de s’assurer d’un bon sommeil, de limiter le café et d’adopter des horaires irréguliers.

 

Se faire accompagner : un levier puissant

Utiliser le coaching professionnel permet de clarifier le projet, de mieux structurer la recherche, de travailler en confiance, de préparer les entretiens et de bénéficier de conseils et d’astuces inédits. Diverses associations spécialisées dans l’aide à la réinsertion professionnelle, certains clubs de cadres, offrent un accompagnement gratuit et souvent très efficace.

En somme, la recherche d’un nouvel emploi et même une réinsertion professionnelle réfléchie et volontaire sont des situations éprouvantes pour les cadres, car elles fragilisent l’identité professionnelle, génèrent une forte incertitude et mettent à l’épreuve la confiance en soi. Pourtant, avec une bonne compréhension des mécanismes du stress, une organisation adaptée, et une attention particulière à la santé mentale et physique, cette période peut devenir un moment d’évolution constructive.

Gérer son stress ne signifie pas de le faire disparaître entièrement, mais de l’apprivoiser, de canaliser son énergie et de la transformer en moteur d’action. Les cadres qui parviennent à prendre soin d’eux, à s’entourer, et à structurer leur démarche, retrouvent non seulement un poste, parfois même plus important, mais aussi souvent une vision plus claire et plus sereine de leur trajectoire professionnelle.

 

Emile Biardeau

AVARAP

 

Crédit Photo : image de Yananla sur freepick.com