La fête est finie, les cadres ne sont plus maîtres du jeu. Après une belle période d’euphorie, les intentions d’embauche reculent et redescendent à leur plus bas niveau depuis plus de cinq ans. En 2026, le marché du travail des cadres sera caractérisé par des transformations et des défis complexes. Avec, par conséquence, une forte influence négative sur les perspectives de recrutement.

Les analystes sont unanimes : grandes entreprises, ETI, PME, lèvent le pied, si bien que la contraction du recrutement des cadres en France ne fait plus débat. Et rien ne laisse entrevoir un retournement rapide. A l’international, les attaques et les volte-face de Donald Trump déstabilisent l’économie mondiale. En France, la crise politique plonge les milieux d’affaires dans l’incertitude et l’attente.

L’APEC constate que le nombre de recrutements des cadres en France a reculé d’environ 8 % en 2024 par rapport à 2023. Les prévisions indiquent une nouvelle baisse de 4 % en 2025 avec un niveau de recrutement qui pourrait passer sous la barre symbolique des 300 000 cadres. Cette contraction touche tous les secteurs et toutes les régions.

 

Un marché en bascule et des signes d’un marché plus concurrentiel

Le rapport de force entre candidats et entreprises change. Depuis plusieurs années, les cadres disposaient d’un certain « avantage candidat ». Mais la décélération de l’activité économique, l’incertitude et la prudence des entreprises modifient la donne : désormais les employeurs se montrent plus sélectifs, les ajustements sont moins fréquents.

Le nombre de recrutements de cadres débutants est particulièrement touché : -18 % en 2025. Les secteurs traditionnellement moteurs de l’emploi cadre : services à forte valeur ajoutée, informatique, etc., enregistrent également un recul de 18%. En résumé, le marché du travail des cadres entre dans une phase de « normalisation » après le pic des années récentes : la croissance du recrutement ralentit, la concurrence entre les candidats progresse, les opportunités sont plus sélectives.

 

Une conjoncture économique fermée, des profils en tension et des métiers porteurs

L’investissement des entreprises au ralenti et un contexte géopolitique difficile constituent un cadre peu propice à une progression des recrutements de cadres. Par ailleurs, l’OFCE prévoit en France un taux de chômage de 8,5 % fin 2026

Malgré le ralentissement général, certains types de profils et quelques fonctions restent très recherchés : par exemple la de mande de bons spécialistes dans les domaines de l’intelligence artificielle, de l’automatisation, de la cybersécurité ou des data-sciences, est en forte progression.

Cela signifie qu’un cadre disposant de compétences techniques pointues, ou d’un bon positionnement sur un métier stratégique et en évolution, réussira bien. A l’inverse, le recrutement des profils « standards » risque de subir de forts tassements.

Dans un contexte de plus en plus concurrentiel, la pratique des compétences transversales, la capacité d’adaptation deviennent des critères essentiels. De manière générale, on peut noter que les cadres débutants sont parmi les plus touchés par la baisse des recrutements ; les cadres ayant entre un an et quinze ans d’expérience représentent la majorité des embauches ; les « soft skills » (leadership, agilité, interdisciplinarité) sont de plus en plus valorisés.

Avec un marché de l’emploi où l’offre relative des candidats augmente, les marges de négociation se réduisent. La hausse des salaires pourrait être modérée et les cadres devront faire preuve de réalisme. Par ailleurs, la mobilité pourrait être moins spontanée : la stabilité peut devenir un atout. Les cadres devront être plus proactifs : veille sur les compétences, repositionnement, etc.

 

Renforcer et actualiser ses compétences, soigner son employabilité et sa différenciation

En pratique voici ce que peuvent faire les cadres dans cet environnement troublé :

  • Si possible, se repositionner sur des domaines émergents et stratégiques : IA, cybersécurité, datas… • Compléter ses connaissances techniques par des compétences transversales : gestion du changement, capacités de communication, leadership, etc… Prévoir une formation continue, si possible de bon niveau et reconnue ; mettre en valeur ses réalisations, montrer l’impact business de ses responsabilités.
  • Construire un « réseau » actif, non seulement transactionnel, mais aussi contributif (participation à des groupes professionnels, réalisation de conférences).
  • Adapter son « personal branding » : profil LinKedIn, CV, site personnel ; être prêt à bouger, ou à diversifier son expérience, la mobilité interne ou externe, géographique, si toutefois elle est assortie d’une progression ou d’une promotion.
  • Choisir ses opportunités avec discernement. Dans un contexte de marché du travail atone, accepter un changement seulement si les conditions sont meilleures (mission, entreprise, rémunération, etc.).
  • Evaluer la santé de l’entreprise : dans un contexte de ralentissement, les entreprises avec de solides fondamentaux offrent plus de stabilité et de possibilité de développement.
  • Ne pas négliger l’équilibre vie privée/vie professionnelle. Pour les cadres expérimentés, il est important de prévoir la montée en responsabilités ou la spécialisation d’expert plutôt que de rester dans une « zone de confort ». Pour les cadres plus jeunes ou débutants, il peut être judicieux de viser des rôles de chef de projet ou de coordinateur plutôt que d’attendre le poste idéal.

En matière de mobilité internationale ou transversale, rester ouvert aux opportunités.

 

En 2026, les professionnels devront d’adapter à un environnement en constante évolution, où les compétences numériques, la diversité, la durabilité et la recherche du bien-être seront les priorités.

Les entreprises qui réussiront à anticiper ces tendances et à les intégrer dans leur culture organisationnelle seront mieux positionnées pour prospérer dans un monde en mutation. En somme, les cadres de demain devront faire preuve d’agilité, d’innovation et d’empathie pour naviguer avec succès dans ce nouveau paysage professionnel

 

Emile Biardeau

AVARAP

 

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