Un article AVARAP la grande mutation du marché de l'emploi

Aux Etats-Unis le mouvement qualifié de la « Grande Démission » (« The big quit »,) a vu plus de 38 millions d’Américains quitter leur emploi en 2021. En France, bien que le phénomène soit moins spectaculaire il n’en reste pas moins préoccupant.

 

Selon le ministère du Travail fin 2021 ou début 2022, 520 000 personnes ont démissionné, dont 470 000 étaient en CDI.  Il est désormais possible de parler d’un salariat liquide. Cette tendance concerne tous les secteurs mais, comme le note Vincent Meyer, professeur de gestion des ressources humaines et théorie des organisations à l’EM Normandie elle est plus marquée dans certains secteurs (construction, hôtellerie-restauration…) ce qui entraîne d ‘importants problèmes de recrutement.

La pandémie et le développement du télétravail ont entraîné une réflexion sur le sens de sa vie et de son travail. Toujours travailler plus pour gagner plus et s’acheter des produits dont une bonne partie n’est pas vraiment nécessaire… Peut-être serait-il plus sage de s’arrêter de courir, garder du temps pour soi, retrouver le goût des choses simples ; s’intéresser aux autres…

 

Mettre l’équilibre vie privée/vie professionnelle comme priorité absolue

Le télétravail a également suscité l’envie d’échapper aux contraintes des grandes villes et rechercher une vie plus calme à la campagne ou dans des villes moyennes.

En lien, en bonne partie, avec ce phénomène 250 000 entreprises artisanales ont été créées en 2021.

Selon Thomas d’Ansembourg, psychothérapeute et formateur en relations humaines, il faut repenser notre façon d’être au monde. Développer un espace intérieur, regarder autrement ce que j’ai déjà vu (ou ce que je n’ai pas su voir justement). Remettre en question ma position : suis-je disponible pour être ouvert à la posture de l’autre ? Ralentir, faire silence…

Après le « burn-out » résultant d’un excès de travail conduisant à l’épuisement, est apparue une nouvelle pathologie le brown-out (qui signifie littéralement « baisse de courant »). Le salarié ne comprend pas (ou plus) la signification de son travail. Occupé à des tâches inutiles il est totalement démotivé. On pourrait parler d’un épuisement professionnel par l’ennui.

« Le travail utile est par lui-même un plaisir ; par lui-même, et non par les avantages qu’on en retirera. » Alain

La quête de sens mise en avant pour expliquer le désir de changement dépend souvent également d’éléments concrets liés au management.

Pour près de sept salariés sur dix (69 %), le critère décisif serait les conditions de travail. C’est le résultat majeur d’un sondage réalisé par Ipsos pour RingCentral. (infoRH juin 2022)

Le cabinet de recrutement Ana Partners met en avant une dizaine de raisons : une surcharge excessive de travail ; pas assez de responsabilités ; manque de stimulation et de challenge ; manque de reconnaissance ; mauvaises relations avec ses collègues de travail ; en mauvais termes avec sa hiérarchie ; aucune perspective d’évolution au sein de l’entreprise ; le salarié ne peut espérer aucune augmentation de salaire ; le bien-être du salarié passe après les profits de l’entreprise ; le salarié n’a aucune marge de manœuvre dans l’entreprise.

Les jeunes diplômés sont particulièrement concernés par les conditions de travail et le souci de l’environnement.

 

La démission « discrète »

Un autre phénomène a fait son apparition : le “quiet quitting” ou le ras-le-bol de ceux qui décident de faire le minimum au travail, une forme de “démission discrète” en quelque sorte.

Monique Dagnaud, directrice de recherche à l’EHESS, explique :  « Quand on demande aux individus comment ils réagissent face à un horizon bardé de menaces et d’incertitudes, à quelles ressources ils puisent désormais pour reprendre énergie et espoir, la solution qu’ils avancent n’est pas celle d’un surinvestissement dans le travail.  L’idée d’une échappatoire dans l’activité professionnelle n’est presque jamais citée par rapport à d’autres éléments de consolation : se rapprocher de la nature par exemple, ou donner plus de temps à sa famille ou à des activités culturelles. »

« Tous les signes indiquent une définition évolutive du travail et la nécessité pour les entreprises d’écouter, d’apprendre et de s’adapter aux souhaits des employés. Une semaine de travail de quatre jours est le dernier changement positif dans ce domaine », a-t-on entendu au World Economic Forum Annual Meeting  Davos, Suisse  22-26 mai 2022.

Pour toutes ces raisons, on constate que le rapport de force salariés-entreprises s’est, en partie, inversé. Face à cette situation beaucoup de chefs d’entreprises sont convaincus de la nécessite d’adopter un style de management prenant davantage en compte la dimension humaine du travail. Il s’agit de répondre à de nouvelles exigences : accepter une partie en télétravail consentir des augmentations de salaires, accorder plus de flexibilité…

 

Progrès technique et progrès humain ne sont pas toujours associés 

David Graeber, anthropologue, énonce une vérité première : « Un métier est d’autant moins payé qu’il est utile à la société ».

Les métiers les plus utiles sur le plan humain (aide à domicile, auxiliaire de vie sociale (AVS), infirmière, sage-femme, enseignant, aide-soignant, agent d’entretien, conseiller en insertion (CIP), éducateur de jeunes enfants…) sont les moins considérés et les moins rémunérés. Beaucoup de ces emplois sont occupés majoritairement par des femmes.

Ces inégalités sont de moins en moins acceptées. D’autant que de grandes entreprises ont réalisé d’importants profits ces deux dernières années.

En 2021, dans une étude diffusée par l’INSEE, la direction générale des entreprises (DGE) évalue à 1 million le nombre de startups en France. Parmi elles, on compte19 licornes, ces start-up valorisées plus d’un milliard de dollars.

 

Le management par le stress a encore de beaux jours devant lui dans les secteurs de pointe

L’exemple de Tesla est, à cet égard, révélateur. Elon Musk, dans une note interne, donne les consignes suivantes : « Toute personne qui souhaite faire du travail à distance doit être au bureau pour un minimum (et je dis bien un minimum) de 40 heures par semaine ou quitter Tesla ». Elon Musk « examinera et approuvera » au cas par cas la situation de ceux qui ne pourraient pas atteindre le minimum d’heures indiqué.

Les trois étapes à suivre par les employés lorsqu’ils reçoivent des instructions : expliquer pourquoi on n’est pas d’accord, demander des éclaircissements ou bien s’exécuter. Si l’une de ces trois options n’est pas respectée, « le manager sera invité à démissionner immédiatement ».

 

Et l’Avarap dans tout ça ?

Changer d’activité ne s’improvise pas. Il est impossible de répondre à la question « dois-je quitter mon travail ? »  sans se connaître soi-même au préalable.

La première partie du cycle AVARAP en particulier (introspection, dynamique de groupe, intelligence collective…) a précisément pour objectif de faciliter la réponse à cette question.

Il s’agit de retrouver un état d’esprit permettant d’envisager l’avenir avec confiance et sérénité, ce qui, dans le contexte actuel, nécessite un travail de préparation important.

Claude Génin

AVARAP